Frédérique Rimareix : Lorsque l’on est diabétique de type 1 ou de type 2, les risques sont liés à l’hyperglycémie avant et pendant la grossesse. Un déséquilibre glycémique au moment de la conception augmente le risque de malformations fœtales durant le premier trimestre. Il est donc fondamental de programmer la grossesse, et de surveiller l’hémoglobine glyquée au moment de la conception. Avec dans l’idéal un objectif d’HbA1C proche de 6.5 % au moment de l’arrêt de la contraception (le risque de malformations fœtales rejoint alors celui des femmes non diabétiques). Un bon équilibre glycémique avant et pendant la grossesse permet aussi de réduire les risques d’excès de croissance fœtale (macrosomie) et de pré-éclampsie (maladie associant une hypertension artérielle et une protéinurie).
Comment programmer correctement sa grossesse ?
Frédérique Rimareix : Il est nécessaire d’en parler avec son diabétologue avant d’arrêter sa contraception. Cela permet de faire le point sur l’équilibre glycémique et de trouver des solutions pour l’optimiser. Un bilan des complications sera également réalisé ainsi qu’un fond d’œil et un bilan rénal. Une supplémentation par acide folique sera également mise en place avant la conception. Une consultation avec un obstétricien prenant en charge des femmes diabétiques permettra d’évoquer les spécificités du suivi.
Y a-t-il une différence de traitement entre diabète de type 1 ou de type 2 lors d’une grossesse ?
Frédérique Rimareix : Le traitement dans le cadre d’un diabète de type 1 repose sur l’insulinothérapie par multi-injections ou par pompe externe en dehors et pendant la grossesse. Dans le diabète de type 2, la programmation de la grossesse permet d’adapter le traitement avant la conception. Les antidiabétiques oraux étant contre-indiqués pendant la grossesse, l’introduction d’une insulinothérapie est nécessaire.
Dans tous les cas, l’objectif est de maintenir les glycémies les plus stables possibles, et si possible inférieures à 0.90 g/l avant les repas et à 1.20 g/l deux heures après les repas. Le fractionnement des prises alimentaires permet d’éviter les pics glycémiques. L’adaptation des doses d’insuline très régulièrement est indispensable notamment à partir du deuxième trimestre de la grossesse, période où les besoins en insuline augmentent en rapport avec les hormones placentaires.
Un suivi à distance des courbes glycémiques par le diabétologue est un complément très utile aux consultations classiques et permet de tenir le cap et d’être soutenue tout au long de la grossesse.
Quel suivi est opéré pendant la grossesse ?
Frédérique Rimareix : Un suivi avec l’obstétricien est réalisé chaque mois en consultation. La croissance du bébé est surveillée de façon plus rapprochée avec des échographies mensuelles en seconde partie de grossesse. Une échographie cardiaque fœtale est réalisée si le diabète est déséquilibré à la conception.
Certaines choses changent-elles au moment de l’accouchement ?
Frédérique Rimareix : A partir du troisième trimestre, et jusqu’à l’accouchement, une surveillance accrue de la maman et du bébé est mise en place. Un enregistrement du rythme cardiaque fœtal est réalisé à partir du huitième mois à domicile et plusieurs fois par semaine. La tension artérielle de la maman est également surveillée. Pour les femmes diabétiques de type 1 ou de type 2, l’accouchement est généralement déclenché 15 jours avant le terme pour éviter les risques de trop gros bébé, et pour limiter les problèmes d’oxygénation foetale liés au vieillissement du placenta. Dans l’idéal, l’accouchement doit se faire dans une maternité de niveau 2 ou 3, car celles-ci possèdent des services de Néonatalogie.
Après l’accouchement, il y a une chute brutale des besoins en insuline. Les doses d’insuline sont donc redéfinies en fin de grossesse avec le diabétologue et ré-adaptées régulièrement après l’accouchement.
La pompe à insuline présente-t-elle des avantages pour gérer son diabète lorsque l’on est enceinte ?
Frédérique Rimareix : Oui, la pompe à insuline est un outil thérapeutique qui permet de s’adapter au mieux aux besoins en insuline des patientes tout au long de la grossesse.
Cela permet de limiter les risques d’hypoglycémies et d’hyperglycémies et donc la variabilité glycémique et améliore la qualité de vie. Elle peut être utile lors de la conception mais aussi tout au long de la grossesse. Toutefois, l’indication doit être posée au cas par cas et requiert une éducation des patientes.
Pour conclure, le suivi médical est intensifié en cas de diabète préexistant. La programmation de la grossesse permet de réduire drastiquement les risques de complications pour la maman et le bébé. Il est très important d’être soutenue durant cette période particulière avec une bonne coordination entre le diabétologue et l’obstétricien.
Interview par la Fédération du Docteur Frédérique RIMAREIX, Praticien Hospitalier, Centre Diabète Nutrition et Grossesse , Paule de Viguier – CHU TOULOUSE , Service de Diabétologie, Maladies Métaboliques, Hôpital Rangueil – CHU TOULOUSE
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