L’activité physique, indispensable en cas de diabète

Pour Paule Nathan, endocrinologue, diabétologue, médecin du sport et nutritionniste, l’activité physique fait partie intégrante du traitement si l’on est porteur d’un diabète. Interview.

L’activité physique est-elle nécessaire lorsque l’on est concerné par un diabète de type 1 ou 2 ?

Paule Nathan : L’activité physique est nécessaire et indispensable, et fait partie intégrante du traitement. Cela fait également partie de l’hygiène préventive nécessaire quand on est à risque de faire un diabète. On sait par exemple que l’obésité et le syndrome métabolique augmentent dans notre pays. Ils peuvent évoluer et entraîner le développement de diabètes de type 2 si l’on n’agit pas précocement. Les règles hygiéno-diététiques dont l’activité physique permettent de diminuer ce risque.

L’activité physique est aussi un traitement à mettre en place dès le début des diabètes de type 2 car, au tout début, ils peuvent être réversibles si l’on adopte une bonne hygiène de vie. Les patients ont de plus en plus envie de se prendre en main, et nous leur proposons notamment d’avoir une activité physique. Dès que l’on observe une augmentation de l’hémoglobine glyquée, à 6,2, ou 6,8 par exemple, il faut prendre en charge ce problème et l’activité physique fait partie des traitements recommandés.

Le diabète type 2 est souvent lié à une sédentarité, elle-même associée à une mauvaise alimentation. On sait en outre que 70% des diabétiques de type 2 ne font pas d’activité physique.

Dans le cadre du diabète de type 1, l’activité physique permet d’améliorer la qualité de vie. On va chercher à développer le plaisir de faire un effort physique. Dans le cas des deux diabètes, avoir une activité musculaire permet donc de réduire les risques cardio-vasculaires, et d’améliorer la condition physique.

Faut-il obligatoirement pratiquer un sport ?

PN : L’activité physique n’est pas forcément synonyme de sport ! On cherche à favoriser chez les patients tout type d’effort musculaire. Généralement on fait le point avec les patients : on regarde comment ils dépensent leur énergie, et depuis plusieurs années nous observons souvent que les dépenses énergétiques des patients ont diminué. On les incite donc à dépenser leur énergie, à faire des efforts musculaires, et à les augmenter progressivement. C’est particulièrement difficile en ce moment car beaucoup de patients sont concernés par le télétravail, et les gens se déplacent moins. Nous incitons toutes les personnes porteuses d’un diabète à faire du rangement, à monter les escaliers, téléphoner debout par exemple… l’objectif étant de se réapproprier son corps en mouvement, car nous sommes trop statiques ! Il faut aussi retrouver le plaisir de faire des mouvements.

L’activité physique permet de retarder l’évolution des complications, cela réduit également le stress, et améliore la confiance et l’estime de soi. Les patients avec une meilleure estime d’eux-mêmes sont d’autant plus observant de leur traitement.

Pour les patients qui souhaitent pratiquer un sport, le plus recommandé est souvent la marche, voire parfois la marche rapide, ou encore la natation, notamment pour les personnes souffrant de problèmes locomoteurs. Pour ceux qui souhaitent la pratique de sports en résistance, on conseille d’associer un sport en endurance et de surveiller plus étroitement leur équilibre glycémique.

Par ailleurs, il faut savoir que depuis mars 2017 on peut prescrire l’activité physique pour les patients diabétiques, cela peut permettre par exemple de faire de la kinésithérapie ou de pratiquer un sport encadré par une fédération. C’est ce que l’on appelle l’activité physique adaptée (APA) ou sport sur ordonnance.

A quoi faut-il faire attention pour pratiquer un sport ?

PN : Il faut faire attention aux contre-indications, au type de sport, cela dépend de chaque personne, et de sa forme. Suivant la durée du diabète et l’âge du patient on regarde les facteurs cardiologiques, l’état de sa vision, de ses pieds, et de son équilibre. Les hypoglycémies sont à prévenir par l’éducation du patient porteur du diabète avec une vigilance pour les hypoglycémies tardives en sachant que des hyperglycémies transitoires peuvent survenir lors d’efforts violents en résistance. Une bonne hydratation doit être maintenue au cours de l’effort (½ litre toutes les 30 minutes), le sportif doit partir bien hydraté.

Par ailleurs, si avant l’effort la glycémie est encore mal contrôlée (supérieure à 2g50), on déconseille un effort trop important. On recommande surtout aux patients porteurs de diabète de type 1, insulino-dépendants, de contrôler leur glycémie pendant, avant et après l’effort, en fonction de sa durée. Avec les capteurs glycémiques on peut contrôler la glycémie pendant l’effort, ce qui peut être utile au moins au début pour apprendre à connaître comment son corps réagit.

Si le taux glycémique est inférieur à 1,30 pour un exercice de courte durée, il faut prévoir une supplémentation de 10 à 15 g de glucides avant l’effort. Pour un effort en endurance de plus de 30 minutes, on conseille un apport de 15 à 30 g de glucides à absorption rapide toutes les 30 minutes, avec un repas après l’effort de glucides à absorption lente pour reconstituer les stocks de glycogène. Pour un effort très intense, on commence à 45 g et la personne pourra se resucrer après.  Après l’effort, si la glycémie est abaissée à moins de 0,8 g/l, le sportif prend une collation de glucide. Globalement on adapte toujours les apports glucidiques, les doses d’insuline ou de traitements insulino-sécréteurs à l’intensité et la durée de l’effort. Il en va de même pour l’insuline, on baisse l’insuline rapide si l’effort est proche du repas, pour les personnes qui utilisent des injections. Avec une pompe à insuline, il faut généralement baisser le débit de base une heure avant l’effort, mais chaque personne doit le définir avec son médecin. On conseille aussi d’avoir sur soi de quoi se resucrer pendant l’effort si besoin.